Avr
2018

INAPTITUDE

Depuis le 1er janvier 2017, les régimes de l’inaptitude physique d’origine professionnelle et de l’inaptitude non professionnelle ont été rapprochés sur le plan de la procédure.

Définition

L’inaptitude est reconnue par le médecin du travail lorsqu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste (c. trav. art. L. 4624-4).

L’employeur est alors tenu d’une obligation de reclassement dans un poste conforme aux capacités du salarié sauf si le médecin du travail précise que le maintien dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé fait obstacle à tout reclassement.

Reconnaissance de l’inaptitude

L’inaptitude du salarié à son poste de travail ne peut être décidée que par le médecin du travail (c. trav. art. L. 4624-4).

Le médecin du travail ne peut constater l’inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que sous les conditions suivantes (c. trav. art. R. 4624-42) :

  • avoir réalisé ou fait réaliser une étude du poste ;
  • avoir réalisé ou fait réaliser une étude des conditions de travail dans l’entreprise et indiqué la date à laquelle la fiche d’entreprise a été actualisée ;
  • avoir réalisé au moins un examen médical du salarié, accompagné, le cas échéant, d’examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d’aménagement, d’adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste ;
  • avoir également procédé à un échange avec l’employeur, par tout moyen.

Depuis le 1er janvier 2017, un seul examen peut suffire (contre deux précédemment, et sauf exceptions)

La notification de l’avis d’inaptitude intervient au terme du délai maximum prévu pour faire passer un second examen, lorsque le médecin du travail l’estime nécessaire. L’avis doit être notifié au plus tard 15 jours après le premier examen.

Le médecin du travail transmet l’avis d’inaptitude au salarié ainsi qu’à l’employeur par tout moyen donnant une date certaine à cette information. Il en verse également une copie dans le dossier médical du salarié (c. trav. art. R. 4624-55). L’employeur doit conserver l’avis d’inaptitude pour être en mesure de le présenter à tout moment à l’inspecteur du travail et au médecin inspecteur du travail.

Le modèle d’avis d’inaptitude est fixé par arrêté (c. trav. art. R. 4624-57). Un nouveau modèle s’applique depuis le 1er novembre 2017 (arrêté du 16 octobre 2017, JO du 21, texte n° 28)

Situation du salarié après le 1er examen

Le code du travail ne précise pas la situation du salarié durant le délai de 15 jours qui sépare le premier examen médical et la déclaration d’inaptitude ni, par conséquent, s’il faut rémunérer ou non cette période.

Selon le ministère du travail, « dans l’attente de la décision d’inaptitude, le salarié reste en poste et perçoit sa rémunération. Le médecin du travail peut préconiser des aménagements de poste. Dans certains cas, le travailleur pourra bénéficier d’un arrêt de travail pour maladie » (http://travail-emploi.gouv.fr/sante-au-travail/suivi-de-la-sante-au-travail-10727/article/reforme-de-la-medecine-du-travail-et-des-services-de-sante-au-travail-questions).

Préconisations écrites du médecin du travail

L’avis d’inaptitude est établi par le médecin du travail qui doit l’accompagner de conclusions écrites, assorties d’indications quant au reclassement du salarié depuis le 1er janvier 2017

Si le médecin du travail rend un avis d’inaptitude sans préconisation malgré la nouvelle rédaction de la loi, il est plus prudent de revenir vers lui.

Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation destinée à le préparer à occuper un poste adapté. Depuis le 1e r janvier 2017, cette obligation concerne toutes les entreprises (et pas seulement celles d’au moins 50 salariés) et les inaptitudes d’origine non professionnelle ou professionnelle (et plus seulement ces dernières) (c. trav. art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

Le médecin du travail peut mentionner dans cet avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi (c. trav. art. R. 4624-42). Cette mention dispense l’employeur de son obligation de recherche de reclassement

Contestation

Depuis le 1er janvier 2018, le conseil de prud’hommes est compétent pour statuer sur les avis d’aptitude ou d’inaptitude ainsi que les propositions, conclusions écrites ou indications des médecins du travail (c. trav. art. L. 4624-7).

L’avis médical d’aptitude ou d’inaptitude doit indiquer les délais et voies de recours (c. trav. art. R. 4624-45).

Reclassement

Que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non, l’employeur a l’obligation de chercher à reclasser le salarié dans un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des propositions du médecin du travail. Ce reclassement, qui doit être aussi proche que possible de l’emploi précédent, peut nécessiter une mutation, des adaptations, aménagements ou transformations de postes ou un aménagement du temps de travail (c. trav. art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

La recherche de reclassement doit s’étendre à l’entreprise, à ses établissements, ainsi qu’ au groupe.

La recherche de reclassement est obligatoire, sauf cas de dispenses, y compris dans les situations suivantes :

  • inaptitude partielle ou totale ;
  • lorsque le salarié ne manifeste pas le désir de reprendre le travail ou affirme son impossibilité de travailler à l’avenir dans l’entreprise

Dans le cadre du régime posé par la loi Travail du 8 août 2016, l’employeur est réputé avoir satisfait à son obligation de reclassement lorsqu’il a proposé, après avis du comité social et économique (des délégués du personnel, dans l’attente de la mise en place du CSE) « un emploi » prenant en compte les conclusions écrites et les indications du médecin du travail. Si au terme de ses recherches l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié inapte, il doit l’informer par écrit des motifs qui s’opposent à son reclassement (c. trav. art. L. 1226-2-1, L. 1226-12 et L. 1226-20).

Dispense/Refus de l’obligation de reclassement

Le médecin du travail peut mentionner dans l’avis d’inaptitude que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi (c. trav. art. R. 4624-42)

L’employeur est alors dispensé de recherche de reclassement, que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou d’origine non professionnelle (c. trav. art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12). Il peut engager la procédure de licenciement.

En cas de refus du salarié, soit l’employeur formule de nouvelles propositions de reclassement, soit il licencie l’intéressé aux motifs de l’inaptitude et de l’impossibilité de reclassement.

Le fait qu’un salarié refuse une proposition de poste ne suffit pas à démontrer que l’employeur a respecté son obligation de reclassement. après un refus, l’employeur doit, le cas échéant, faire de nouvelles propositions s’il existe d’autres postes possibles.

Licenciement

L’employeur peut rompre le contrat de travail en raison de l’inaptitude du salarié s’il justifie (c. trav. art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12) :

  • soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions de son obligation de reclassement ;
  • soit du refus par le salarié d’un emploi proposé dans ces conditions ;
  • soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi

L’employeur doit suivre la procédure de licenciement pour motif personnel (convocation à l’entretien préalable, etc.) (c. trav. art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12).

Le préavis n’est pas applicable, que la procédure émane d’une inaptitude d’origine professionnelle ou non professionnelle. Le contrat de travail est rompu dès la notification du licenciement.

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte, il est exclu de signer une rupture conventionnelle individuelle, même avec l’accord du salarié.

Reprise du versement du salaire

Un mois après l’examen médical à l’issue duquel l’inaptitude a été déclarée, si le salarié n’a pas été reclassé ou licencié, l’employeur doit recommencer à lui verser son salaire. Le salaire dont l’employeur doit reprendre le versement est la rémunération correspondant au poste que le salarié occupait avant la suspension de son contrat de travail (c. trav. art. L. 1226-4 et L. 1226-11). Ce salaire ouvre droit à une indemnité de congés payés.

JURISPRUDENCE

Le 5 avril 2018, la Cour de cassation a jugé que la prolongation de l’arrêt de travail du salarié intervenue dans l’intervalle des deux examens médicaux de reprise n’a aucune incidence sur l’obligation pour l’employeur de reprendre le versement du salaire un mois après la déclaration d’inaptitude.

La Cour de cassation a annulé la décision des juges du fond. Pour la Haute juridiction, l’inaptitude du salarié ayant été constatée à l’issue de la seconde visite de reprise du 29 juin 2012, l’employeur devait reprendre le paiement du salaire à l’issue du délai d’un mois suivant cette date, peu important la délivrance d’un arrêt de travail postérieurement au premier examen médical.

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