La loi portant sur les mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat met en place, de façon pérenne, une « prime de partage de la valeur » (PPV).
Elle prend le relais de l’ancienne prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (PEPA). La nouvelle prime est assortie d’un régime social de faveur. Jusqu’au 31 décembre 2023, les primes versées aux salariés dont la rémunération est inférieure à 3 fois le SMIC sont de plus exonérées d’impôt sur le revenu et de CSG/CRDS.
Décryptage et tableaux récapitulatifs.
Modalités de mise en place et bénéficiaires
Accord ou décision unilatérale.
La prime de partage de la valeur (PPV) peut être mise en place soit par accord d’entreprise ou de groupe conclu selon les modalités d’un accord d’intéressement (c. trav. art. L. 3312-5, I). Soit par une décision unilatérale après consultation du CSE lorsqu’il existe (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV).
La mise en place de la PPV est facultative et est possible par toute entreprise, quelle que soit sa taille.
À la différence de l’ancienne PEPA, la prime de partage de la valeur est un dispositif pérenne, que les entreprises peuvent mettre en place chaque année, le cas échéant selon des conditions différentes. Mais si un employeur met en place la prime pour une année donnée, rien ne l’oblige légalement à la remettre en place l’année suivante.
Salariés bénéficiaires.
La PPV peut concerner soit l’ensemble des salariés éligibles (voir tableau), soit uniquement ceux dont la rémunération n’excède pas un certain plafond qu’il faut alors fixer dans l’accord ou la décision unilatérale (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV).
Pour être éligible aux exonérations, la prime doit bénéficier aux salariés liés à l’entreprise par un contrat de travail, soit à la date de versement de la prime, soit à la date de dépôt de l’accord ou de signature de la décision unilatérale mettant en place la prime (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, III, 1°).
Spécificités pour les intérimaires
La mise en place de la PPV dans une entreprise doit aussi bénéficier aux intérimaires mis à sa disposition à la date de versement de la prime ou à la date de dépôt de l’accord ou de signature de la décision unilatérale mettant la prime en place (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, II, al. 2).
Néanmoins, c’est l’entreprise de travail temporaire (ETT) qui verse cette prime aux intérimaires concernés, selon les conditions et modalités fixées par l’accord ou la décision unilatérale de l’entreprise utilisatrice. L’entreprise utilisatrice qui attribue la PPV à ses salariés doit en informer l’ETT « sans délai » et cette dernière doit alors informer son CSE.
Cette prime ouvre droit aux mêmes exonérations que celles applicables à la prime versée aux salariés de l’entreprise utilisatrice.
Montant de la prime et critères possibles de modulation
Le montant de la prime est fixé par la décision unilatérale ou l’accord qui en est à l’origine (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV).
Le cas échéant, son montant peut être modulé en fonction de critères limitativement énumérés (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, III, 2°) :
- La rémunération ;
- Le niveau de classification ;
- L’ancienneté dans l’entreprise (maximum 3 mois) ;
- La durée de présence effective pendant l’année écoulée (sachant que les congés liés à la maternité, la paternité, l’adoption et l’éducation des enfants sont assimilés à de la présence effective) ;
- La durée de travail prévue au contrat en cas de temps partiel.
Attention : les conditions de modulation de la prime selon tout ou partie des critères autorisés doivent être prévues dans l’acte de mise en place de la prime (accord ou décision unilatérale selon le cas). Il est impossible de procéder à une modulation « sauvage » au moment du versement si cela n’a pas été prévu.
Versement en plusieurs fois possibles, mais pas plus d’une fois par trimestre
Le versement de la prime peut être réalisé en une ou plusieurs fois, dans la limite d’une fois par trimestre, au cours de l’année civile (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV). L’employeur peut donc verser la prime en 4 fractionnements maximum. L’objectif est d’éviter que de trop nombreux versements remplacent des augmentations de salaire ou des primes.
Initialement prévue pour une application à compter du 1er août 2022, la possibilité de versement de la PPV a été avancée au 1er juillet 2022 (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, II). L’objectif est de couvrir les entreprises ayant décidé de verser la prime dès les annonces du gouvernement, sans attendre.
Exonérations : un régime de faveur à deux volets
Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € par an et par bénéficiaire.
Le montant maximal de la prime susceptible d’être exonéré est en principe de 3 000 € par an et par bénéficiaire (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, V).
Cette limite est portée à 6 000 € dans certaines situations, et en particulier pour les entreprises dotées d’un dispositif d’intéressement, les entreprises non soumises à l’obligation de mise en place de la participation, (schématiquement, les « moins de 50 salariés ») mais appliquant à titre volontaire un dispositif de participation, ainsi que certaines associations et fondations (pour le détail, voir plus loin).
Régime de base : exonération limitée aux cotisations sociales
Dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € selon le cas, la prime est exonérée des cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle (parts salariale et patronale), de contribution formation, de taxe d’apprentissage et de participation construction (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, V).
Elle est assujettie :
- à la CSG/CRDS au titre des revenus d’activité (9,20 % + 0,50 %) ;
- au forfait social sur la fraction exonérée de cotisations dans les mêmes conditions que l’intéressement (entreprises de 250 salariés et plus seulement) ;
- et à l’impôt sur le revenu (pas d’exonération fiscale).
Régime d’exonération renforcé jusqu’à la fin 2023 pour les salariés payés moins de 3 SMIC. – Jusqu’au 31 décembre 2023, en complément des exonérations sociales précitées, la prime est également exonérée d’impôt sur le revenu, de CSG/CRDS et donc de forfait social, lorsqu’elle est versée à des salariés ayant perçu une rémunération inférieure à 3 fois le SMIC annuel au cours des 12 mois précédant le versement de la prime (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, VI).
Dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € selon le cas, les primes de partage de la valeur versées à ces salariés jusqu’au 31 décembre 2023 sont donc totalement exonérées (ni cotisations, ni CSG/CRDS, ni forfait social, ni impôt sur le revenu).
Situations donnant droit au plafond d’exonération de 6 000 € par an
Quatre cas. – La limite d »exonération de la prime de partage de la valeur est fixée à 6 000 € par an (au lieu de la limite de principe de 3 000 €) dans les quatre situations suivantes (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, V) :
- Les entreprises dotées d’un accord d’intéressement ;
- Les entreprises non soumises à titre obligatoire à la participation, mais dotées d’un accord de participation ;
- Certaines associations et fondations ;
- Les ESAT, pour leurs travailleurs handicapés.
Bulletin de paye
La prime de partage de la valeur doit apparaître sur le bulletin de paye.
S’il en était besoin, ce point a été confirmé par le site Internet du Travail, qui au passage recommande une ligne spécifique compte tenu des exonérations associées à la prime (https://travail-emploi.gouv.fr/droit-du-travail/la-remuneration/article/la-prime-de-partage-de-la-valeur).

1) Cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle (parts salariales et patronales), contribution formation, taxe d’apprentissage et participation construction.
(2) Par an et par bénéficiaire. 6 000 € pour les entreprises dotées d’un accord d’intéressement, les entreprises de moins de 50 salariés appliquant titre volontaire un dispositif de participation, les associations et fondations reconnues d’utilité publique ou d’intérêt général (CGI art. 200, art. 1° a et b et 238 bis, 1°, a et b) et les travailleurs handicapés sous contrat de soutien et d’aide par le travail dans les ESAT (voir nos développements pour le détail).
(3) Exonération sans condition de niveau de rémunération (donc y compris pour les salariés payés plus de 3 SMIC, si la prime leur est aussi attribuée).
(4) Après abattement d’assiette de 1,75 % selon net-entreprises.fr (Base de connaissances DSN, fiche 2592 diffusée le 16/08/2022), sous réserve de confirmation par le BOSS.
(5) Puisque les critères généraux d’assujettissement au forfait social ne sont pas réunis. (6) Même condition d’effectif que pour l’application du forfait social à l’intéressement.