Sep
2018

RUPTURE DE LA PERIODE D’ESSAI

Pour faire suite à notre publication  « POINT DETAILLE SUR LA PERIODE D’ESSAI » du mois de mars 2018, nous allons évoqué les modalités de rupture de la période d’essai.

Sauf dispositions conventionnelles particulières, employeur et salarié peuvent mettre fin à la période d’essai à tout moment, avec un délai de prévenance, mais sans autre formalité. Concernant l’employeur, la personne de l’entreprise qui a le pouvoir de rompre la période d’essai est celle qui a le pouvoir de licencier.

En l’absence de dispositions conventionnelles, un écrit est recommandé pour des raisons de preuve (notamment du respect du délai de prévenance). Il est même conseillé de notifier avec une LRAR ou remise en main propre contre décharge.

L’employeur n’est pas tenu d’alléguer, dans le courrier de rupture, les raisons qui le conduisent à mettre fin à la période d’essai. Pour autant, il ne peut pas rompre l’essai pour n’importe quelle raison.

DELAI DE PREVENANCE

L’employeur ou le salarié qui souhaite rompre l’essai doit observer un délai minimal de prévenance (c. trav. art. L. 1221-25 et L. 1221-26), lequel s’applique aux contrats à durée indéterminée (CDI), mais aussi aux contrats à durée déterminée (CDD) comportant une période d’essai de 1 semaine minimum (circ. DGT 2009-5 du 17 mars 2009, p. 2).

Rupture de la période d’essai : délai de prévenance
Présence du salarié dans l’entrepriseDélai de prévenance
Rupture EmployeurRupture salarié
7 jours maximum24 heures24 heures
De 8 jours à 1 mois48 heures48 heures
Au-delà d’1 mois2 semaines48 heures
Au-delà de 3 mois1 mois48 heures

Le cas échéant, il faut appliquer le délai de prévenance plus favorable au salarié, prévu par la convention collective, un accord collectif ou le contrat de travail. À défaut, l’employeur devra indemniser le salarié pour la partie du délai de prévenance non respecté (cass. soc. 15 avril 2016, n° 15-12588 D). Les juges ont ainsi appliqué la sanction prévue par le code du travail en cas de non-respect du délai de prévenance légal.

Si l’employeur ne respecte pas le délai de prévenance, le salarié a droit à une indemnité compensatrice, sauf s’il a commis une faute grave. Cette indemnité est égale au montant des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du délai de prévenance, indemnité compensatrice de congés payés comprise

Le délai de prévenance ne doit pas avoir pour effet de prolonger la période d’essai, renouvellement inclus.

PROTECTIONS APPLICABLE A LA RUPTURE DE LA PERIODE D’ESSAI

L’interdiction des discriminations est applicable à la période d’essai (c. trav. art. L. 1132-1). Il en résulte que dans le cas où un employeur, qui a rompu une période d’essai, a manifestement souhaité écarter un salarié en raison de ses récents problèmes de santé, la rupture est nulle (cass. soc. 16 février 2005, n° 02-43402, BC V n° 52). Cela signifie que, en principe, le salarié devrait être réintégré. Celui-ci peut néanmoins choisir l’indemnisation de son préjudice plutôt que la réintégration.

Protection en cas d’accident du travail – La résiliation du contrat de travail pendant la période de suspension provoquée par un accident du travail est nulle même si elle intervient pendant la période d’essai.

Protection de la maternité – La rupture du contrat de travail pendant l’essai est interdite lorsqu’elle est motivée par l’état de grossesse de l’intéressée.

Protection des représentants du personnel et autres salariés protégés – Le statut protecteur dont bénéficient certains salariés, en raison du mandat ou des fonctions qu’ils exercent dans l’intérêt de l’ensemble des travailleurs (ex. : un représentant du personnel) s’applique à la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur pendant la période d’essai.

DATES ET SUITES DE LA RUPTURE

La rupture d’un contrat de travail se situe à la date où l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin, c’est-à-dire au jour de l’envoi de la LRAR notifiant la rupture.

Aucune indemnité de rupture ni aucune indemnité compensatrice de préavis n’est due, à l’exception de l’indemnité compensatrice de congés payés.

Seul l’abus dans la rupture de l’essai peut justifier l’indemnisation du préjudice causé au salarié.

JURISPRUDENCE

Cass. soc. 12 septembre 2018, n° 16-26333

Dans cette affaire, la salariée avait été embauchée le 2 septembre 2013 avec une période d’essai de 4 mois.

Elle avait été en arrêt maladie du 9 octobre au 21 octobre puis du 24 octobre au 19 novembre, date à laquelle l’employeur avait mis fin à sa période d’essai.

La salariée avait saisi le conseil de prud’hommes estimant qu’elle avait fait l’objet d’une mesure discriminatoire liée à son état de santé (c. trav. art. L. 1132-1).

La cour d’appel estimait que la rupture de la période d’essai avait effectivement été motivée par l’état de santé de la salariée. Cette rupture était, de ce fait, nulle et l’employeur a été condamné à verser 10 000 euros de dommages et intérêt à la salariée (notamment au vu des frais de déménagement de la Réunion à la métropole)

En revanche, la demande de la salariée de versement de l’indemnité de préavis et des congés payés liés à ce préavis avait été rejetée.

La salariée contestait ce point devant la Cour de cassation : selon elle le fait que l’interdiction de discrimination soit applicable à toute relation de travail, y compris pendant une période d’essai, lui permettait de réclamer les indemnités liées à un licenciement illicite et à toutes les indemnités de rupture.

La demande est rejetée par la Cour : les dispositions sur la rupture du contrat à durée indéterminée (CDI) ne sont pas applicables pendant la période d’essai (c. trav. art. L. 1231-1). Cela exclut notamment le bénéfice des règles sur le préavis et l’indemnité compensatrice du préavis (c. trav. art. L. 1234-1).

Pas d’indemnité de préavis en cas de rupture de la période d’essai

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